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Le Conseil communal de Woluwe-Saint-Lambert,

Vu les votes du Conseil communal en faveur du projet de ré-aménagement de la place Saint-Lambert (un premier vote le 10/7/2015, confirmé le 21/9/2015) ; (1)

Vu la décision du Collège du 17/12/2015 attribuant le marché à la firme WEGEBO pour le montant de l’offre de 1.689.662,90€ TVAC dont 538.924€ pour le poste « pavés en granit » (càd 32% du marché) ; (2)

Vu l’arrêté de suspension pris le 23/2/2016 par le Ministre-Président du gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale pour « Offre anormalement basse », le moins-disant WEGEBO s’écartant de plus de 20% en dessous de la moyenne des montants des offres des soumissionaires et l’estimation initiale du marché budgeté pour 3,2M€ ; (3)

Vu la motivation rédigée par la division Réalisation et Entretien du 15/3/2016 pour justifier les prix « anormalement bas » et particulièrement le poste 40-33 (22% sous la moyenne); (4)

Vu les informations transmises par WEGEBO à l’administration communale sur la constitution de son prix pour le poste 40-33 mentionnant la firme HOFMAN n.v. de Hofstade pour la fourniture de pavés et la firme ABW de Beerse pour le pavage (document analyse des prix par le service); (5)

Vu la décision du Collège du 17/3/2016 de maintenir sa décision du 17/12/2015 approuvant l’attribution du marché à la firme WEGEBO sur base de la motivation division Réalisation et Entretien du 15/3/2016 ; (6)

Vu la confirmation du 1/6/2016 par le Ministre-Président du gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale que la délibération du 17/12/2015 ne soulève plus d’objection ; (7)

Vu que le SPF Economie agit en tant qu’autorité pour la surveillance du marché dans le cadre du règlement 305/2011 pour les produits de construction et conformément aux prescriptions de la Commission Européenne repris dans le règlement 765/2008 relatif à la surveillance du marché pour la commercialisation des produits ; (8)

Vu les clauses techniques du CCT 2011 (§C.22.2) : le cahier des charges doit indiquer si les pavés sont en roche sédimentaire carbonatée, porphyre, quartzite, grès dur (non feuilleté), marbre rouge ou granite ; (9)

Vu les clauses techniques du CCT 2011 (§C.19.1.1) sur l’origine géologique des pierres naturelles : le certificat d’origine qui accompagne chaque fourniture doit fournir obligatoirement les informations sur la nature lithologique précise de la pierre (NBN EN 12670), la classification macroscopique selon la NIT228 du CSTC, le nom commercial de la pierre, l’origine géologique de la pierre (statigraphie), et l’origine géographique précise ; (10)

Vu que les pavés en granite sont des produits en pierre naturelle couverts au minimum par la norme harmonisée EN 1342 (Pavés de pierre naturelle pour le pavage extérieur) ; (11)

Vu que les travaux sont en cours d’exécution et les matériaux livrés exposés au vu et au su de tous ; (12)

Considérant que le cahier des charges spécifie uniquement «pavés en granit 30/15/12 de teinte grise» ; (1)

Considérant qu’il existe une confusion entre « granit » et « granite » avec ou sans «e» : en géologie, le terme granite désigne une roche magmatique plutonique ayant une composition minéralogique et chimique spécifique. Les marbriers utilisent l’appellation générique « granit » pour qualifier des granites stricto sensu mais aussi des gneiss, des grès, des brèches, des calcaires tel le « petit granit des Ardennes »; (2)

Considérant que le service n’a pas jugé utile d’inclure dans le cahier des charges des spécifications techniques minimales en usage pour ce type de fournitures afin d’assurer la livraison de matériaux de qualité durables dont : masse volumique (NBN EN 1936), porosité (NBN EN 1936), résistance à la compression (NBN EN 1926), résistance à la flexion (NBN EN 12372) et gélivité (NBN EN 12371) ; (3)

Considérant que, concernant la fourniture de pierres bleues (uniquement), le service a caractérisé à minima le matériau «calcaire crinoïdique non argileux de l’ère primaire…» et exigé une provenance «de carrières ayant obtenu l’agrément technique délivré par l’UBAtc catégorie C» ; (4)

Considérant que le service n’a pas jugé utile de faire effectuer des tests de vérification quant à la catégorie et la qualité des éléments en pierre naturelle par un laboratoire ou un organisme indépendant à la réception de ceux-ci sur le chantier (CCT 2011 Art 12, §5, B) ; (5)

Considérant que la justification par la division Réalisation et Entretien des prix «anormalement bas» repose sur une simple comparaison avec les prix des autres offres reçues et ne tient pas compte de critères qualitatifs, fautes de spécifications. Elle qualifie de prix «anormalement élevés» des prix supérieurs sans considération pour des critères qualitatifs pouvant expliquer la différence de prix ; (6)

Considérant que ni la firme HOFMAN ni la firme ABW n’ont été sollicitées par WEGEBO pour livrer les pavés et effectuer le pavage et que le représentant de la firme HOFMAN, Koen Hofman, envisage une action légale contre la fime WEGEBO qui demande régulièrement des prix sans passer commande mais utilise son nom et sa réputation pour crédibiliser ses prix auprès des administrations publiques; (7)

Considérant que l’approbation de la motivation des prix par la Région le 1/6/2016 est basée sur la justification du service, elle-même basée sur des informations trompeuses fournies par WEGEBO sur la structure de son prix alors qu’il y a une forte présomption que WEGEBO n’avait pas l’intention de se fournir chez HOFMAN et que dès lors l’acceptation de la justification des prix soit invalide; (8)

Considérant que l’examen de l’intégralité du dossier «Place Saint-Lambert» mis à disposition les 27 et 28/7/2017 n’a pas mis en évidence le moindre échange de correspondance concernant les caractéristiques souhaitées ou la provenance des pavés de «granit» (lieu de production) ; (9)

Considérant que les caractéristiques techniques des pavés étaient inconnues du service jusqu’à ma demande fin juillet 2017 lorsqu’une demande à été adressée à Wegebo pour obtenir ces informations ; (10)

Considérant qu’il y a plusieurs mois, en commission, interrogé sur l’origine des pierres dont des exemplaires étaient en démonstration, le bourgmestre a répondu que «les pavés proviendraient du Portugal et les pierres bleues d’Irlande» ; (11)

Considérant que le marquage sommaire apposé sur 3 faces des palettes de pavés (« granite G341A » en anglais) n’est pas conforme aux exigences légales et ne permet pas d’en connaître les caractéristiques (pétrographie, indicateur de performance, normes techniques…) et qu’une constatation a été faite sur place par le SPF Economie le 26/07/2017 ; (12)

Considérant que le marquage, le logo gravé sur le bois des palettes et le type de palettes très particulières utilisé pour le transport ont permis, de tracer la provenance jusqu’à un producteur dans la province de Shandong, dans le nord de la Chine à Qingdao ; (13)

Considérant que le granite G341 est promu par les traders chinois comme un matériau à bas coût sans aucune garantie de durabilité « G341 is the cheapest grey granite in China »; (14)

Considérant que le Rapport d’incidence inclus avec le dossier d’enquête publique promet un projet «visant l’utilisation de matériaux nobles, solides et résistants, donnant du cachet…» ; (15)

Considérant que l’expérience de l’utilisation de matériaux d’origine asiatique à prix cassés dans la commune s’est révélée désastreuse comme on a pu en juger dans d’autres projets : rue de la Chapelle, les pavés de grès indien Kandla ont explosé au premier gel ; sur le site du Wolubilis, les pierres de parement fondent littéralement et se fracturent ou laissent apparaître des taches de rouille suite à la présence parasite de pyrite dans la pierre. On peut aussi craindre des défauts au château Malou (rénovation – abords) où il apparaît que de la « pierre bleue » d’origine chinoise a également été utilisée ; (16)

Considérant le courrier de mise en garde reçu de la part de monsieur Francis TOURNEUR, Docteur en Sciences, Secrétaire général de l’ASBL «Pierres et Marbres de Wallonie» Professeur en Faculté d’Architecture de l’Université de Liège (annexe) ; (17)

Considérant qu’un défaut de qualité impliquant le remplacement des pavés sur 5.400m² dans le futur aurait des conséquences dommageables importantes pour les finances communales, les usagers de la place et les établissements commerciaux du pourtour de la place ; (18)

Considérant les efforts de la commune dans le cadre de l’Agenda 21 et l’urgence face aux défis climatiques traduit dans l’adhésion aux engagements de la COP21 de la Belgique, il ne serait pas responsable d’ignorer la performance environnementale des matériaux de construction dont les coûts liés au cycle de vie et l’impact de leur transport sur de longues distances ; (19)

Considérant que le gouvernement Chinois a bloqué 80% de la production de granite G341 depuis le 7 mai 2017 en invoquant la pollution excessive et ce, jusqu’à l’amélioration des conditions de production ; (20)

Considérant que l’entrepreneur, les sous-traitants et les producteurs européens sont sujets à des obligations strictes en matière de sécurité et de santé en ce qui concerne les conditions de travail des travailleurs, il ne serait ni éthique ni socialement responsable d’ignorer les conditions de production des matériaux importés ; (21)

Considérant que les producteurs chinois de pavés type G341 affichent librement sur le site web corporatif stonecontact.com (http://wzstein.stonecontact.com et http://wzstein.com) des photos montrant les ouvriers à l’oeuvre sur des sites de production ; (22)

Considérant que ces photos ne dissimulent pas les conditions de travail et témoignent d’une absence totale de mesures de protection individuelle des travailleurs : travail pieds nus, en tongs, en short, sans gants, sans casque et sans lunettes de protection ; (23)

Considérant qu’aucune garantie n’a été fournie sur le respect des conditions de travail légales dans le pays de production eu égard au respect des conventions de l’Organisation Internationale du Travail (conventions n°29, 87, 98, 100, 105, 111, 138 et 182), ni en matière de respect de la sécurité et du bien-être au travail ; (24)

Considérant que les ouvriers chinois exploités ne sont aucunement responsables de cette situation et qu’ils payent, à n’en pas douter, un lourd tribut en accidents du travail, tandis qu’il reste aux ouvriers carriers belges et européens l’amertume de voir leurs emplois ainsi sacrifiés au bénéfice de profits commerciaux chez nous ou ailleurs ; (25)

Considérant que les responsables politiques à tous niveaux devraient avoir la préoccupation d’organiser des marchés équitables et éthiques qui ne désavantagent pas les producteurs nationaux ou européens et les travailleurs qu’ils emploient ; (26)

Considérant qu’il existe des modèles de clauses environnementales, éthiques et sociales juridiquement validées au niveau européen à insérer dans les cahiers spéciaux des marchés publics d’aménagements (annexe : Circulaire ministérielle) ; (27)

Le Conseil communal de Woluwe-Saint-Lambert :

DENONCE les conditions inacceptables de production des pavés chinois

DEMANDE au Collège :

  • de suspendre immédiatement les travaux de pavage de la Place Saint-Lambert ;
  • de lever les inconnues sur la qualité et l’origine des matériaux utilisés ;
  • de vérifier la conformité de ce marché en particulier la validité de la justification de prix fournie par Wegebo en lumière des informations otenues tout récemment ;
  • d’initier sans délais un changement radical dans les pratiques du service en relevant significativement le niveau des exigences techniques et normatives des cahiers des charges futurs y compris en incluant systématiquement des clauses sociales, environnementales et éthiques.

Pour écolo:

Jean-Claude Van der Auwera

0475 490954

jc.vanderauwera@gmail.com

Annexes :

  • Etiquette apposée sur les palettes de pavés
  • Dossier photographique illustratif
  • Lettre du professeur F. Tourneur
  • Modèle de clauses sociales et environnementales

Communiqué de presse du 28/8/2017